Une dernière bouffée d’air avant le retour

Baltimore, West Cork relèvera le niveau de ce séjour en Irlande.

Julie m’a tellement vendu du rêve sur Galway que quand j’y ai mis les pieds, j’ai été déçue de découvrir une ville peuplée, tous ces gens … mais c’est beaucoup de personnes dans un même espace! Il est où le village ?

Des lacs du Connemara, je ne verrai pas grand-chose. Qu’une solution, revenir quand il y a moins de monde, pas à Noël en tout cas, et aller marcher hors de la ville. À mon arrivée à Baltimore, je suis heureuse de retrouver les grands espaces, la mer, le vent et … oh personne à l’horizon. Même l’auberge où nous logeons est vide!

Quelqu’un pour nous ouvrir, nous accueillir ? Pas besoin, en Irlande, on fait confiance en un coup de fil, au son même de ta voix. Une première pour Julie et moi : faire la visite de l’auberge au téléphone, activer le groupe électrogène, allumer les frigos et le gaz, c’est vraiment comme si l’hostel nous appartenait! Mais le gardien des lieux vient vite nous rappeler qui est le chef. Un chat au regard bleu lagon et à la fourrure blanche boueuse bondit sur la table de la cuisine pour annoncer son arrivée et nous fait visiter le restant de l’auberge. Nous l’abandonnons vite pour aller nous promener. De un, c’est un chat et nous on les aime pas. De deux, l’appel du large! L’air frais iodé nous réveille et il nous en faut pas plus pour s’aventurer jusqu’à l’océan. 

Du haut de la falaise, au pied de ce suppositoire géant – on a beaucoup d’imagination – nous regardons le soleil se coucher. Julie se met à chanter (pour se réchauffer…): De « Let it go » à de la chanson française dont je ne peux même pas vous dire les titres. Tout y passe. Les rares promeneurs doivent nous prendre pour des folles. L’une chante contre le vent et l’autre fait des acrobaties pour filmer des fleurs et les vagues qui se cassent sur les rochers en contrebas. Nous formons un couple étrange et décalé. C’est peut-être ça notre force. Un peu de folie (beaucoup!), de la curiosité, de l’énergie et de la joie de vivre, d’être là à profiter du moment présent. 

Le froid nous ramène vite sur terre et nous force à nous remettre en marche, sinon nous allons terminer gelée! Nos fesses sont un peu ankylosées par le froid (ou par le manque d’exercices du weekend) et nos estomacs crient famine. Nous n’avons vu aucun magasin dans le village et nous ne pouvons pas compter sur un passant pour demander notre chemin. Par chance, un vieux loup de mer à l’accent irlandais incompréhensible (je suis persuadé qu’il parlait une autre langue, c’est pas possible autrement) nous explique que le magasin le plus proche est à Skibbereen, soit à plus d’une demi heure de voiture. Et donc, impossible pour nous à pied. Cependant, il y a une épicerie au village, petite de taille mais grande en services rendus. En plus de fournir des produits d’alimentation, elle fait aussi centre d’informations, vente de tickets pour les ferries, poste et Bancontact.

Ce soir, c’est … pasta! Ah pas surpris ? Ça sonne comme du réchauffé. Pourtant, les pâtes, il n’y a que ça de vrai. Julie cuisine comme un chef pendant que je … glande … travaille … me lance dans une bataille avec le chat, parce qu’il pense qu’il vaut mieux que moi ce matou. Il est le roi ici et il croit que je dois à tout prix le caresser. Il rêve ou quoi! 

Notre routine habituelle post-dîner commence: dérush des cartes SD, chargement des batteries, tri et sélection des photographies, retouches des images et publication sur les réseaux sociaux. Je perds Julie entre l’éditing et Facebook… ses paupières deviennent trop lourdes pour rester ouvertes. Allez au lit! Il faut prendre des forces pour le lendemain.

8h du matin, après une bonne nuit de sommeil et un bon petit déj en compagnie du maître des lieux (le chat, pas le proprio), Julie et moi partons sans trop d’empressement rejoindre le port. C’est ainsi qu’on rate le ferry de 9h30, qui était en fait à 9h15. Merci pour les indications de l’épicière du coin ! Demi-tour vers l’hostel, c’est tempête dehors et nous n’avons aucune envie d’attendre encore une heure dans le vent. D’ailleurs, nous nous demandons si les ferries circulent avec cette pluie. 

Vers 11h, nous mettons enfin les pieds sur Sherkin Island où aucune âme ne semble vivre … Trop chouette, nous avons l’île rien qu’à nous. Un vieux loup de mer nous avait indiqué la veille à la sortie du bus qu’il était possible de faire le tour de l’île en moins de 3h. En route la troupe ! Il ne fait pas un temps à traîner… dans le vent, la pluie et l’iode, qui ne tardent pas à s’acharner sur nous. Mon mascara waterproof n’y résiste pas et des larmes noires coulent sur mes joues. J’ai au passage un conseil capillaire de première ordre à vous transmettre : qui veut des beach waves parfaites, rendez-vous sur Sherkin Island. Rapide, gratuit et brushing en prime! Si le mascara était en place, j’aurais presque l’air canon !

Bon cesse ces bavardages superficiels! Revenons à nos moutons. Justement en parlant de ces êtres laineux à quatre pattes, ils semblent être les seuls habitants de l’île. Nous ne croisons personne. Même le pub est fermé, vous entendez ? Le seul pub de toute l’île Sherkin est fermé ! Mais … mais comment vivent ces gens ? C’est sûr pour Julie et moi, personne ne doit vivre ici … l’hiver. Nous imaginons même quelques instants trouver les clés de cette belle maison face à l’océan sous un pot de fleur dans le jardin et de nous y installer jusqu’au printemps … Personne n’aurait remarqué notre présence. 

En 2h30, nous en avons fait le tour … quand je dis le tour, c’est le tour complet, d’ouest en est, du nord au sud. Retour à la case « attendre le ferry sous la pluie ». 

Oh quelle est cette présence vivante, poilue et très odorante ?! Une forme humaine ? Vous rêvez ouais, ce sont deux chiens ! Sont-ils perdus ou les seuls habitants à la ronde ? Nous pique-niquons avec eux assis sous l’abri « bus-ferry ». Nous nous occupons en les prenant en photos, jouant avec eux et en les caressant. Ces chiens ont l’air heureux et libres. Quelle vie! Mais une question persiste. Qui s’en occupe ? Où vivent-ils ? Jusqu’à notre départ en bateau, les chiens resteront avec nous sans que personne ne les rappelle. Nous ne saurons jamais, peut-être sont-ils les gardiens des lieux venus nous saluer avant notre retour vers la terre ferme.

Sherkin Island restera dans mes souvenirs l’île du Flat coated Retriever et de son fidèle ami, le Border Collie. Mes deux amis du jour et sûrement, la seule rencontre digne d’être racontée sur ce morceau de terre. 

Le retour a toujours été un moment plein d’émotions. Généralement, c’était avec beaucoup de bonheur que j’envisageais mon retour à la maison. Pendant mes études à Bruxelles ou lors de mes (très rares) voyages, le trajet était toujours l’instant où je me demandais si la maison et ma famille avaient changées. Que s’était-il passé en mon absence ? Mais cette fois, mes sentiments sont différents. Je suis heureuse, bien sûr, de rentrer mais dans ma tête, les choses s’embrouillent. Dans l’avion, j’imagine qu’on m’emmène en fait vers une autre destination, je me demande qu’elle sera notre prochain voyage, comment allons-nous rentabiliser ce projet et le continuer pendant un bon bout de temps. Tant de questions et pourtant, une seule solution me saute aux yeux : essayer très fort, repartir et tenter le coup! Qu’ai-je à perdre ? Qu’ai-je à gagner ?

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